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Medellin: ambigüe ville de l'éternel printemps

Agréable ville où nous pouvons exprimer, en ville une fois n'est pas coutume, nos humeurs vagabondes et curieuses.

Au jardin botanique nous revoyons un échantillon de la végétation déjà observée en Colombie, Au parc Explora l’aquarium nous donne une image des poissons qu’il est difficile de voir dans les rio ou la mer. L’exposition interactive sur la notion du temps nous met les pendules à l’heure, mais la théorie de la relativité finit de griller nos quelques neurones d’attention…il se fait tard et nous devons gagner avant la nuit notre quartier sûr établi à Poblado dans une auberge de jeunesse ( (nous + les enfants ) / 4, ca fait une moyenne encore jeune, non ?)

Le dimanche, en différé géographique depuis Medellin, sur la cyclovia libre de voitures, nous courons (chacun 10km) du marathon de la Paz, en soutien à nos amis Cristian, Marisol qui l’organisent (les inscriptions devraient permettre de réunir la somme nécessaire à l'opération du cœur de leur fils Rafael).


Mais laissez nous conter notre marquante visite de la Communa 13, contre l’oubli, pour mieux comprendre et partager son histoire complexe et tragique.

Ce quartier à flanc de montagne, à l’ouest de Medellin, a toujours été une zone de trafic stratégique, entre les jungles du Choco, de l'Antioqua où se cultive la coca, et l’aéroport, où armes, cocaïne et argent sale transitent.

Andrés, ses 8 sœurs et 4 frères sont nés là, lui en 1985. Solide gaillard au visage rayonnant, la vie lui a appris l’humilité, la sérénité autant que la prudence. Il nous guide parmi les détours de son quartier. Malgré sa triste réputation, dans ses souvenirs d’enfance la vie dans la Communa 13 était paisible. Seules les pluies diluviennes hantaient les pires cauchemars des habitants, balayant en quelques minutes leurs maisons de fortune en carton et planches vers le bas de la montagne. En 1993, le patron du cartel, Pablo Escobar, plus riche et recherché criminel de la planète, est assassiné dans sa fuite par la police.

Ambivalent, il défendait le peuple colombien tout en le rackettant: ‘plata o plomo’ (l’argent ou le plomb), et commanditait de sanglants attentats.

Mais lorsqu’on coupe une tête au monstre, il en pousse des dizaines, avides de pouvoir. Jusqu’en 2001, différentes milices rivales d’extrême gauche, dont les FARC, contrôlent les 23 quartiers de la zone 13. La sécurité des habitants se payait au prix d’une vacuna (taxe ou « vaccin »), sécurité toute relative puisqu’on avait moins de chance de survivre au passage d’une frontière invisible entre deux quartiers que de se jeter du haut d’une falaise. La criminalité, liée aux règlements de compte, est à son comble, quand en 2001 Uribe arrive au pouvoir. Tel un cowboy, à la solde d’une droite libérale, il entend « pacifier » le pays et reprendre le contrôle lucratif de cette Zona 13 en particulier. 1500 militaires, policiers et paramilitaires (groupes de mercenaires sans foi ni loi) sont mobilisés pour l’opération Orion. Andrés se souvient de ces années de guerre urbaine, de profil bas, de méfiance constante et de ces 3 jours du 15 au 17 octobre 2002 à son paroxysme, des deux hélicoptères blindés desquels déferlaient les balles qui transperçaient les murs, tuant malfrats comme civils innocents. Des snipers positionnés en haut de la colline, des hommes masqués de noir, mouchards du quartier ou paramilitaires infiltrés dans les milices, indiquant du doigt quelle maison bruler et qui capturer. Des viols, des centaines de torturés, civils disparus, abattus puis armés pour prétendre à leur culpabilité, démembrés et lancés dans la fosse commune clandestine de la Escombrera. Encore aujourd’hui le quartier recherche ses fantômes, chaque 16 Octobre des parents en deuil défilent en blanc pour réclamer la vérité.

Tant de violence dans la ville de l’éternel printemps, pour une paix durable ?…non… sempiternel recommencement, de nouveaux groupes criminels se mettent en place et se succèdent depuis lors, corrompant des dirigeants politiques.


Alors la grande question : que faire…? Comment enrayer cette spirale de violence??


La « transformacion » passe par une forte action publique. L’arrivée du Métro, la construction d’un escalator en acier inox pour faciliter la vie des habitants. Des fonds pour l’encouragement des jeunes à pratiquer les arts de rues (Hip Hop, coloration des maisons et dessins urbains). Aujourd’hui chose impensable il y a quelques années les touristes, guidés par des jeunes du quartier, sont bienvenus, pour leurs pesos qui soutiennent la vie des gens, et pour qu’ils sachent, parlent au monde.

La connaissance et l’accès au savoir, à la conscience, comme meilleure arme.

Sortir les enfants de quartier de l’étroitesse des possibles, qui les conduisaient trop souvent à la criminalité.


Un collège et des équipements sportifs flambant neufs, une université en construction, de jeunes enfants effectuant des stages de policiers, fiers dans leur chemise blanche. Pour que « poco a poco » les 26 groupes criminels encore en place perdent de leur pouvoir. Andrés devra donner un peu de son revenu touristique à l’un des jeunes adolescents armés à la tête de son quartier, lui même à la solde d’un baron plus influent, de mèche avec des politiques corrompus qui achètent ainsi la « stabilité » aux groupes de trafiquants, tout en se remplissant les poches. Action publique de long terme, corruption et liens entre politiques et narcotrafiquants, comme long et tortueux chemin vers la paix civile.


Jeunes et plus jeunes danseurs des rues, souriants, toupies humaines, boules d’énergie aux corps élancés, renversés, rivalisant de vélocité. Leurs mamans vendent des encas et jus aux marches des escalators. Des artistes peintres décorant les murs de dessins évocateurs de paix, un musée, des boutiques de tee shirt et autres souvenirs. Des papis fiers de nous rassurer que toutes les ruelles sont sures. La communa 13, le jour de notre visite, n’était pas la terreur et le bain de sang sous les étoiles d’Orion, le présent ne peut rejoindre le passé…mais c’est bien le futur, celui des habitants, qui est en jeu dans cette pacification à laquelle, une fois n’est pas coutume, le tourisme semble pouvoir contribuer positivement.




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