top of page
  • biodivercyclos

Buenaventura en el Pacifico

Katrina, un soir : « Vous devriez aller chez Dona Oralia, à La Barra.

Depuis Buenaventura, il faut prendre une « lancha » (?!) avant la nuit vers Juanchaco. Ensuite marcher deux petites heures sur la plage vers le nord à marée basse, sinon prendre des motos sur un chemin de terre ». Informations spartiates, mais ces bribes sont suffisantes pour lâcher notre bride.

Simplement 5h30 de bus direction Buenaventura. Le chauffeur du car double les camions dans les virages de montagnes comme s'il tenait à tous prix que nous nous soyons à l'heure pour le dernier bateau de 16h.

Buenaventura ! Un nom évocateur…plus grand port du pays, plaque tournante du trafic de cocaïne sud américain, que l’armée pourtant omniprésente a peine à enrailler malgré de fréquentes saisies. Ambiance africaine, population plus pauvre que la moyenne, mais toujours souriante. Avec le plus de discernement possible, nous mettons notre confiance sur un jeune homme connu des gens de la gare, pour nous aider à retirer de l’argent, acheter nos tickets de bateau au meilleur prix, nous escorter jusqu’au port en toute sécurité.


Là d'énormes palans soulèvent et déposent sur un géant porte-conteners ces boites métalliques colorées qui voient passer tout ce que l'homme peut produire en ce monde.

Notre "lancha" , bateau doté d'un puissant moteur, se remplit in extremis, et deux heures avant la nuit nous propulse à toute allure vers Juanchaco. De là, marcher avant le couperet nocturne de 18h30 dans le sable avec nos lourds sacs à marée montante ne nous enjoue guère. Monter à 4 sur autant de motos pas bien davantage. Calcul vite fait, nous finirons d’arriver à l’aide d’une barque à moteur que nous propose un pêcheur pour bien gagner sa journée.

Nous débarquons chaussures à la main sur la grand plage de la Barra. Un des bouts du monde, loin de son tumulte ! Quelques baraques légèrement surélevées, de bois et de tôle. La grande maison de bois de Dona Oralia n’est pas dure à trouver. Le téléphone passe mal, mais elle a appris notre arrivée. Nous sommes les bienvenus, et, bien sûr, ses seuls clients.

En face de nous, le grand océan Pacifique, sans entrave jusqu’en Indonésie.

Derrière ce semblant de village, la selva, jungle dense, s’étend inextricablement jusqu’aux sommets de la cordillère occidentale. Au Nord un fleuve et sa mangrove infranchissable à pied. Au Sud de belles falaises frappées par l’océan à marée haute.


Ce soir nous sommes chanceux, arrivés juste à temps pour le spectacle : l’astre se fond, pareil à un jaune d’œuf, dans l’océan. Dés 19h, pureté vertigineuse du ciel nocturne ! la plage déserte devient une loge où, quand daigne s’ouvrir le rideau de nuages, se joue « la paix des étoiles ». Silence spatial magnifié par une symphonie terrestre : roulis des vagues que couvre le foisonnement acoustique de centaines d’Organismes Vivants Non Identifiés (OVNI), plutôt du genre insectus. Le chemin vers notre chambre, veillé par quelques crapauds hagards, est balisé du vert fluorescent de centaines de lucioles. Bonne nuit les enfants…le marchand de sable ne se fait pas attendre longtemps…


Au matin nous assistons à une autre ambiance locale, comédie plutôt du genre «singing in the rain » ou « Mary Poppins à la plage ». Protégés par la traditionnelle tôle (quelle meilleure invention pour le confort de l’homme !?) de la terrasse de Dona Oralia, nous pouvons voir les gens passer, démarche tranquille et chaloupée sous une pluie battante, parapluie, téléphone, machette ou courses à la main, musique de fond Salsa émanant de quelques fenêtres alentour.

Il faut dire en prélude qu’ici le ciel a la panse lourde, et déverse implacablement plus de 8 mètres d’eau chaque année (En France on culmine à 1,4m), alors chaque jour se charge d’apporter sa contribution la plus significative à la tâche…

Il faut cependant voir le bon côté des choses, le ciel et même le soleil s’invitent plusieurs fois par jour à la scène, temps laissés au sol de digérer autant de flotte.


Marches le long de la plage de sable gris, ponctuées de baignades dans l’océan. 28°C, dans ces eaux là ! Des escadrons de pélicans migrent en V, poches rentrées, cous et longs becs tendus vers le sud, planant à quelques mètres au dessus des vagues.

Aussi loin que porte le regard : rien ! Malgré la pluie qui porte à plaindre, nous restons là à regarder rouler les vagues. Marin aguerri ou touriste ignorant des choses de la mer, le spectacle est pourtant toujours fascinant.

Contempler l’océan : beau voyage que de rester immobile devant le vide et le plein.


Dans la selva, nous rejoignons des piscines naturelles d’eau limpide que les pluies abondent çà et là. Jungle débordante de vie, foisonnante d’êtres et de végétaux en interactions difficiles à appréhender. Tresses de lianes, orchidées, centaines de bruits incessants, nous rappellent facilement que nous ne sommes qu’une espèce parmi d’autre, bien gauche dans ce milieu aussi charmeur qu’inhospitalier.


S’aventurer plus avant dans de pareils lieux nécessite une aide. Nous nous glissons ainsi sur une barque en compagnie de Santos au sein d’un rio déroulant ses méandres sous le dense couvert végétal. La marée est encore basse et nous pouvons observer les splendides racines doigtées des mangroves (manglare blanca ou pinuela) nous environnant de toutes parts. Au retour l’eau a considérablement monté, quelques aigrettes, et même un toucan nous apparaissent au détour des méandres du rio, sans oublier les grands papillons et libellules bleus.


Nos midis, repas frugaux de mangues, bananes, ananas, arepas (gallette de mais)

Le soir Dona Oralia est à nos petits soins : poissons grillés « tollo » (chien de mer), ceviche, avec riz et bananes plantain frites ou bouillies.

Tout cela demande un peu de temps de préparation, que se charge de combler le cocoloco, cocktail local à base de coco et rhum (ron), ou limoncito con ron.


Les jours passant sans rien apporter de nouveau, nous prenons un matin nos clics et nos claquettes sous la pluie fine, sacs au dos longeant la plage vers la Lancha du retour à la ville. De Buenaventura, bus de noche para Medellin, ville de l’éternel printemps….




122 vues0 commentaire

Posts récents

Voir tout
bottom of page