L’Altiplano, Tibet des Andes. Plateaux austères campés à 4000m à l’Ouest du pays, bordés par des sommets andins, veillés par de hauts volcans enneigés.
En quête de grands espaces, nous ne devrions pas etre en reste. Outre celui du corps qui s’affole au moindre effort, on y sent paraît il immanquablement vibrer le poul de l’aventure.
Nous le découvrirons du Nord vers le Sud, et nous dirigerons donc en premier lieu vers les rives du lac Titicaca au Nord du pays.
Titicaca, bijou d’un bleu merveilleux, dans son écrin de sommets andins, inondé de soleil le jour, inlassablement balayé chaque soir par le vent, témoin la nuit de somptueuses voutes célestes. Foyer de mythes et de civilisations antiques.
Au réveil ce matin, je relis cette phrase inscrite sur les murs de la chambre par de précédents cyclistes.
« es quando paras de tener miedo de l’incertidumbre que l’incertidumbre se converte en aventura ». En gros : laisser sa peur de côté fâce aux incertitudes, et celles ci se convertiront en aventure.
De quoi gonfler le moral quand ces incertitudes justement ne manquent pas : quelle météo auront nous à affronter ? Si le soleil peut y être accablant en journée, le mercure descend fréquemment sous 0 même en été.
L’équipement sera il sûr ? La suite nous prouvera que non.
Trouverons nous les forces physiques et morales d’affronter les difficultés de la route à ces altitudes ? Nous fûmes suffisamment braves.
Sentiment exaltant du départ. Nous quittons la casa de cyclistas au matin, pour nous engager avec nos montures surchargées dans les embouteillages des rues de La Paz, leurs pentes à deux chiffres, leurs gaz d’échappement, le cri des klaxons. Efforts méthodiques, vifs et précis pour caser ensuite notre équipement dans deux cabines de téléférique sans les arrêter. Première mission accomplie ! Nous gagnons 700m de dénivelé et traversons par les airs une grande partie de la ville haute El Alto.
Une audace assez naturelle nous engage sans soucis sur le bas côté de la large route 2, qui demeure sure et plutôt agréable car goudronnée et peu fréquentée ce jour ci.
Encore sur des kilomètres cette mitose urbaine de la pena (hauteur de La Paz) qui continue de s’agrandir dans des banlieues excentrées faites de briques et de broc. Lambeaux de quartiers en perpétuels travaux !
Aux abords de la route, des paysans fabriquent des matelas à partir d’andins de paille, des bergers mènent leurs maigres troupeau de moutons ou lamas sur des champs asséchés, des femmes reviennent courbée de poids d’on ne sait où.
Plus que le fossé que nous longeons, maculé d’ordures par les automobilistes, un gouffre nous sépare de ces gens. Nous échangeons toutefois de sincères et souriantes salutations, bien peu de choses. Difficile de ne pas gamberger au spectacle de cette pauvreté « exotique ». Si les africains, ou les asiatiques affichent souvent une sérénité dans leur quotidien difficiles, les boliviens affichent des airs plutôt tristes. Le voyage nous plonge dans ce réel tragique où nous occupons une place de choix.
A l’horizon et derrière nous, des cieux noirs et leurs rideaux de pluie.
A l’est, la cordillère royale dresse derrière les collines d’épais sommets enneigés à plus de 6000m, que la lumière chaude de fin d’après midi sublime.
Tandis que souffle le hasard de la halte, et la captivante vulnérabilité qui va avec, le vent de face est un calvaire. Nous bataillons, zigzageons sur place et finissons par atteindre Batallas en fin de journée, secs mais rincés de fatigue… Les quelques kms qui resteraient pour atteindre les abords du lac à Puerto Perez sont au dessus de nos forces.
Le soleil couché, l’ombre et le froid envahissent rapidement les ruelles de Batallas. Nous engloutissons une énorme soupe chaude dans un boui boui accueillant, et dégotons une chambre où le confort se résume à l’essentiel : de bonnes couvertures de laine doublées, de l’eau dans les toilettes partagées.
Au petit matin, le soleil caressant nos visages au travers des fines vitres nous sort de notre torpeur, et inaugure de nouvelles aventures.
Au village de Sanka La Huira, nous sommes fortuitement à l’heure et au lieu d’une fête traditionnelle avec musiciens, danses et discours, à laquelle nous sommes très aimablement conviés. 4 étrangers sont la cerise sur leur beau gâteau en ces temps de disette touristique. Hommes aux regards vifs et sombres, Indiennes aux joues rondes et noircies, aux jupes épaisses, surmontées de leurs chapeaux ronds semblant flotter au dessus d’elles, tournant au rythme des flutes et percussions. Ce folklore coloré perpétue les traditions très ancrées du peuple Aymara vivant sur l’Altiplano. Dépaysement culturel des plus agréable !
Depuis leurs barques, des paysans coupent des joncs, qu’ils transformeront en artisanat, en jonques où en radeaux flottants et cabanes pour les touristes, car leurs maisons prennent désormais pied sur la terre ferme.
Au point le plus haut de notre journée, nous campons face à un paysage grandiose sur le lac, renforçons la tente par une bâche au cas où car l’orage gronde, mais nous épargnera encore. Une pensée pour les paysans qui eux en appellent à la Pachamama pour que tombe la pluie sur leurs cultures.
Titicaca est si grand qu’on dirait la mer, mais 3800m au dessus du Pacifique ! Les mouettes, les canards sauvages, les plages de galet, un leger ressac.
Pour traverser le détroit de Tiquina, nous descendons de nos montures pour les caler contre un bus sur un radeau de bois brinquebalant. Accoudés au bastingage nous observons les autres véhicules tanguer et danser avec nous cette Macarena sur ces 700m séparant St Pedro de St Pablo de Tiquina.
Nous zigzageons ensuite à vitesse de marche sur de capricieuses hauteurs qui surplombent le lac, petit plateau grand pignon.
L’oxygène rare, l’effort des montées, nous exortent de boire beaucoup, de caler nos fringales et de nous arrêter souvent. Pauses gratifiées de sensations et d’images vivifiantes. Lac d’un bleu profond pailleté d’argent par les reflets solaires. Une des nombreuses légendes soufflées ici par les vents dit que c’est l’or des incas, jeté au fond des eaux à l’arrivée des hispaniques, qui brille ainsi à la surface.
Ces lieux magnifiques, ces eaux calmes et cristallines ont en effet vu l’homme barbu et hostile (incarné par Pizarre) venir il y a seulement quelques siècles piller l’or et l’argent, et anéantir la civilisation andine. Des descendants métissés de ces anciennes civilisations quémandent aujourd’hui quelques bolivianos ou un bout de pain sur le bord des routes, que leur concèdent quelques nantis depuis leurs 4 roues motrices en direction de leur lieu de fête autant que de pèlerinage : Copacabana.
Après quelques crevaisons, une casse de chaine, nous passons ces montagnes harassantes et pelées, et surplombons ces bâtisses imparfaites de briques rouges assemblées autour de leur basilique blanche au creux d’une baie magnifique, réplique de celle brésilienne à laquelle elle donna son nom : Copacabana !
Dans les lits individuels confortables d’un hostal familial nos corps s’effondrent, tandis que nos cerveaux dopés de plaisir digèrent les émotions du jour avant de s’éteindre d’une traite jusqu’au matin.
Ruelles vivantes et populaires animées par les innombrables échoppes de rues.
Les yeux gros ouverts, prêts à enregistrer les scènes de vie. S’asseoir à une table là dans ce marché animé des gens d’ici, humer l’ambiance, discuter, gouter les spécialités inconnues. Vivre ainsi un moment la vie des autres, puis repartir vers de nouvelles découvertes.
Prés de la basilique, se concentrent les boutiques de souvenirs et de bondieuseries. Les voitures, décorées de fleurs et de rubans, se font bénir par un prêtre et asperger d’alcool par le chauffeur. Cérémonie rituelle insolite, sensée réclamer la sollicitude de la vierge contre les dangers des routes andines.
Un dimanche à Copacabana, c’est le jour des loisirs touristiques. Nous nous laissons aller à la détente qu’impose l’endroit. Ballade en bateau jusqu’aux iles flottantes (factices, en bois couvertes de roseaux…) , déguster une truite, observer les garçons se défouler dans les loisirs aquatiques, monter au Calvaire en fin de journée. De là nous admirons la ville de haut puis le soleil réfléchir ses derniers rayons avant de tomber lentement derrière l’horizon liquide.
Le lendemain, un guide nous ouvre le musée. Ses réponses à nos interrogations nous permettent d’assembler de nombreuses pièces au puzzle que constituent l’histoire et la culture des différentes ethnies andines locales (Aymara, Quechua, Incas, Tiwanacu). Plus tard nous partons à la recherche de vestiges de la civilisation inca, proches de la cité.
Ces récits ou photographies ne forment qu’une ébauche de réalité, il y a forcément des pertes. Le lecteur laissera son imagination, que nous espérons stimulée, se créer sa propre image de cet ailleurs que nous côtoyons.
Yeah, trop forts les gars zé Linda ! (jvais pas dire les gars et garce , tout d'même ;-) )
Bon, c'est rigolo, j'vous ai suivi comme le Pedro le décrit , avec un ptit openstreetmap ouvert a coté, avec en plus le souvenir des images que j'avais vues à ces endroits avec mon padre. ... Et comme le Pedro, je m'suis posé la meme question sur tes dires au micro, Linda :o)) . Bref, merci pour tes réponses ! et bravo pour avoir fait la chauffeuse de salle pour le vice prez :)
Question: Pedro dit "Cancha Sankahahuira" beh pourquoi ? c'est pas à Copacabana, la ptite sauterie ? Car la Cancha Sanca Jahuira, c'est pas là ;-) )
Je vois que Pierre suit très bien nos évènements :-) !! ahahah merci pour ta question !! En fin cérémonie, on nous a invité à donner nos impressions sur cette belle fête communautaire au micro !! faut dire que les discours emplissent le temps durant ces grandes célébrations et que la 2eme dame du pays avait fait l'honneur de son déplacement !! J'ai donc sorti mon plus bel espagnol pour les remercier de nous avoir invités et les ai chaleureusement félicités pour leur musique, leurs danses et la préservation de ces traditions tel un trésor !!! Ceci avant que ne débarque, en grandes pompes le vice président du pays et prenne ma place au micro :-) :-) !!! dans ce…
j'adore vous lire. J'ouvre une fenêtre Maps et une fenêtre Wix, et j'utilise tous les petits indices de position pour suivre votre périple sur la carte. Dés fois je me dis "Whaouuuu", et d'autre "mais ils sont malaaaades!" (traduire par "qu'est ce que j'aimerai partager ça avec eux") :-P
Question : Que racontait Linda au micro à Cancha Sankahahuira ?
Pleins de bizoux depuis l'hiver européen !
Trop beaux les vélos, vous êtes montés en gamme depuis la Tanzanie ;-)!!! Bon moi j'attends quand même avec impatience de voir Linda habillée en Bolivienne avec tous ses jupons et son chapeau melon...